Première version: 2017-03-19
Dernière version: 2017-04-02
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Le toki pona est une langue construite minimaliste inventée par la linguiste et traductrice canadienne Sonja Lang en 2001. La langue est basée sur la philosophie du Tao et se caractérise par la simplicité extrême de sa phonologie (les sons de base), de sa grammaire (les régles d'écriture) et surtout de son vocabulaire (liste des mots utilisés), ce qui la rend facile à apprendre.
Il s'apparente au langage dit créole (ou anciennement dit "petit nègre") qui va à l'essentiel sans fioriture : moi vouloir sexe avec toi ! Le langage des chasseurs-cueilleurs où il n'y a pas de manipulations ni de nuances mensongères inutiles.
L'écriture d'un concept / idée se fait en écrivant plusieurs mots de base (ce qui forme sa définition). Plus besoin de dictionnaire (excepté pour la centaine de mots de base).
Grâce au nombre de mots réduits, il est possible d'écrire le langage en écriture hiéroglyphique de moins de 255 caractères.
C'est l'une des langues construites les plus concises. Les sons similaires à l'oral (qui pouvaient être confondus, comme bébé et pépé) ont été virés, ce qui facilite la transmission d'informations dans un environnement bruyant ou avec la voix déformée (téléphone, CB, etc.).
2 systèmes d'écriture possibles :
Un système phonétique simple et réduit aux sons fondamentaux présents et prononçables immédiatement par la très grande majorité des êtres humains.
Tout s'écrit en minuscule (même après un point). Seuls les noms propres (noms de personne, de pays) commencent par une majuscule. Ainsi, Elopa signifie Europe, ma Elopa = « pays européen ».
Pour tout ce qui concerne les noms technologiques ou scientifiques, plutôt que de redéfinir à chaque fois le mot (ce qui n'est pas possible pour toutes les nuances d'alliages) le mieux est de placer le mot entre guillemets et d'écrire le nom utilisé par la langue anglaise (qui est devenue la référence question scientifique). C'est la même chose que font les québécois, ils parlent français dans la langue courante mais leurs cours techniques se sont faits en anglais.
ex : "bearing" = roulement, "aluminium" = aluminium
Le mot entre guillemet peut être écrit en anglais direct ou retraduit en phonèmes taki, c'est au bon vouloir de l'auteur.
Les signes de ponctuation suivants sont employés en fin de phrase : point (.), point d'exclamation (!), point d'interrogation (?) et deux-points (:).
Pas de point-virgule et assez peu la virgule. Les signes de ponctuation sont collés au mot qui précède. Exemples :
jan Emili li e pona lukin. - Émilie est jolie.
seme li lon? - Que se passe-t-il?
o kama sona e toki pona! - Apprenez le toki pona!
mi li pilin e ni: toki pona li e pona. - Je pense ceci : le toki pona est bon.
Chaque syllabe a la forme générale suivante : consonne + voyelle + n optionnel. La consonne initiale est optionnelle pour la première syllabe du mot (un mot peut commencer par une syllabe ou une consonne).
Souvent assemblage de 2 ou 3 syllabes.
Une syllabe se terminant par "n" ne peut pas être suivie par une syllabe commençant par "n" ou "m".
Les quatre combinaisons *ji, *ti, *wo et *wu avec une syllabe devant sont interdites à cause de leur difficulté de prononciation.
Un accent tonique doit être porté sur la première syllabe de chaque mot. Les phonèmes sont suffisamment éloignés pour ne pas faire de distinctions précises, comme entre le "a" de patte et de pâte..
a se prononce [ä], comme dans patte.
e se prononce [e̞], comme dans descente.
i se prononce [i], comme dans vie
o se prononce [o̞], comme dans oléifère
u se prononce [u], comme dans fou
Les consonnes p, t, k, m, n, s, l,w et j se prononcent comme leurs symboles dans l’alphabet phonétique international :
k se prononce /k/ comme dans klaxon.
l se prononce /l/ comme dans lait.
m se prononce /m/ comme dans mère
n se prononce /n/ comme dans non.
p se prononce /p/ comme dans père.
s se prononce /s/ comme dans serpent.
t se prononce /t/ comme dans terre.
w se prononce /w/ comme dans web.
j se prononce /j/, comme dans yeux.
En fait, comme il y a très peu de phonèmes et donc peu de risque de confusion, les règles de prononciation sont assez permissives. Un p pourra se prononcer indifféremment p/b, de même pour k/g, s/z et t/d. waso peut se prononcer « ouasseau » ou « oiseau », ampa peut se prononcer « amm-ba », et ainsi de suite.
Chiffre - Prononciation
0 - nul
1 - wan
2 - tu
5 - luka
Les autres nombres sont considérés comme superflus (sic!)... C'est ce qui a conduit entre autre à la création du adam.
Le toki pona utilise l'ordre SVO et va du plus vague au plus précis, que ce soit dans les mots agglutinés ou l'ordre des mots. cheval blanc et non blanc cheval comme en anglais.
Peu de mots dépassent les 2 syllabes, et d'ailleurs en travaillant un peu on pourrait tout réduire à une syllabe (pour une langue en onomatopées) ce qui réduirait la longueur de l'écriture.
C'est une langue agglutinante comme l'Esperanto sauf que les racines ne sont pas collées dans le même mot.
Ainsi, tous les noms relatifs à des personnes ou à des métiers commencent par jan, par exemple :
A noter que les seconds noms (les modificateurs ou qualificatifs) sont aussi vus comme des adjectifs, voir plus loin.
Il faut bien choisir les mots de constructions, en fonction de l'objet et non de son utilisation (qui peut être multiple) ou de sa technologie. Ainsi, parler d'une tige cotonnée et non d'un cure oreille (le coton tige peut servir à nettoyer d'autres choses). Parler d'un oiseau fabriqué plutôt que d'un oiseau métallique pour avion (derniers avions en composites plastiques).
La quantité est une information placée derrière le nom, il n'y a donc pas à gérer de pluriel.
Mute indique plusieurs, mute mute = vraiment beaucoup.
mi = je
sina = tu, vous
ona = il, elle (neutre pour le genre)
Le pluriel des pronoms est être indiqué en ajoutant mute = plusieurs :
mi mute = nous, sina mute = vous, ona mute = ils
Ces mêmes pronoms désignent aussi bien les possessifs que les autres cas :
mi = je, moi, me, à moi
Il n'y a pas d'adjectifs proprement dits en toki pona. Un mot placé en seconde position peut être considéré comme un modificateur du premier. Ainsi :
jan utala (soldat) peut être analysé en « personne combattante » ;
jan pona (ami) peut l'être en « personne bonne/positive ».
Les démonstratifs, numéraux et possessifs suivent toujours les autres modificateurs.
La structure [nom + modificateur1 + modificateur2] est analysée comme [(nom modificateur1) modificateur2]. Ainsi, avec jan pona = personne bonne (ami ou amie) et lukin = voir ou regarder, l'on peut construire :
jan pona lukin = [(jan pona) lukin] = un ami qui regarde.
L'insertion du mot pi permet de casser cet ordre implicite et de modifier en conséquence le sens de la phrase. Ainsi :
jan pi pona lukin = [jan (pona lukin)] = personne bonne à regarder (belle ou jolie personne).
Plusieurs qualificatifs peuvent préciser davantage le nom qu’ils qualifient. On ajoute les qualificatifs un par un derrière le nom
jan utala pona - bon soldat
jan pona utala - ami combattant
jan utala pona mute - de nombreux bons soldats
jan utala pona ni - ce bon soldat
Voici quelques noms composés fréquents :
jan ala pona - ennemi
jan lawa - leader, chef
jan lili - enfant
jan pakala - blessé, accidenté
jan sewi - dieu
jan suli - adulte
jan unpa - amant(e), prostitué(e)
ma telo - boue, marais
ma tomo - ville
telo nasa - alcool, bière, vin
tomo telo - toilettes, salle de bains
On peut aussi faire des combinaisons d’adjectifs sans noms :
ona li e ala pona lukin - il est laid
sina li e pona lukin - tu es jolie
unpa lukin - sexy
Les pronoms employés comme qualificatifs servent de pronoms possessifs.
tomo mi - ma maison
ma sina - ton pays
telo ona - son eau
Les noms en qualificatifs indiquent aussi le possessif :
len jan - le vêtement de quelqu'un
seli suno - la chaleur du soleil alors que suno seli = le soleil chaud.
Ce, cette, etc. est désigné par "ni", placé en qualificatif.
jan utala ni = ce soldat
Pas de genre (elle, il, louve ou loup sans distinction de sexe, on rajoute le sexe derrière le nom si besoin de préciser (loup mère et ses petits incite à penser qu'elle va plus les défendre !) ).
Pour les cris d'animaux, on ne va pas se rappeler que la poule caquète, que l'âne braie, que la vache meugle, etc. L'animal pousse son cri.
Le toki pona est pauvre en vocabulaire (c'est sa force), et se contente de répéter à chaque fois la définition du concept. Répéter à chaque fois "l'endroit ou le fleuve se resserre" devient vite lassant. Alors soit on retombe dans les travers des langues parlées en créant des milliers de mots pour décrire tous les petits détails de la vie (ex : québec), soit on donne un nom propre au concept après l'avoir définit (Québec).
Par exemple :
Jutal li e jan utala pona = un bon soldat est un Jutal.
2 Jutal li utala = 2 bons soldats (Jutal) combattent.
Sujet et prédicat (COD) sont séparés par le mot "li", puis le verbe ou groupe verbal, puis le mot "e" qui annonce le COD.
Par exemple :
mi li lukin = je regarde
Patwik li lukin e sina = Patrick regarde toi (Patrick te regarde)
Le "li" ou la combinaison "li e" peut être vue comme le verbe être :
mi li = je suis
mi li e moku = je suis de la nourriture.
mi li moku = je mange
A noter :
Ainsi, contrairement à l'esperanto, ce n'est pas le suffixe qui détermine si c'est un nom, un adjectif, un verbe ou un COD, mais la position par rapport aux 2 séparateurs "li" et "e".
A noter que si un pronom commence la phrase, il n'y a théoriquement pas besoin de mettre le li, car forcément suivi par le groupe verbal. Je préfère le mettre systématiquement.
mi utala = mi li utala = je combats
utala mi = mon combat
mi pona = mi li pona = je bonifie
mi e pona = mi li e pona = mi pona = je suis bon.
L’adverbe suit directement le verbe qu’il modifie.
mi li lawa pona e jan. = Je conduis bien les hommes.
sina li lukin sewi e suno = Tu regardes vers le haut le soleil.
ona li wile mute e ni = Il veut beaucoup cela.
mi mute li lukin lili e ona = Nous le voyons peu.
La marque de négation est placée en début de phrase, pour mettre en premier l'information indiquant qu'il faudra inverser ce qui suit. Sinon ça obligeait à accepter une affirmation puis ensuite à reconstruire les schémas neuronaux pour inverser ce qui vient d'être décrypter et déjà rangé dans les mauvaises cases mémoires.
oui ou positif est pona, ala (sous entendu ala pona) est non.
Il n'y a presque que des mots positifs (amuser, intéresser) accolé au préfixe ala (non, le contraire de). "ala" est mis devant, pour donner un sens au mot qu'on va lire derrière (modifie la suite).
Donc les mots comme "ike" (mal) disparaissent au profit de "ala pona". Si plusieurs mots à inverser, on répète ala devant chaque mot (il ne faut donc pas de mots avec ala).
mi li ala utala. - Je ne combats pas
mi li utala e ala pona = je combats mal.
meli = féminin, ala meli = masculin.
A noter que dans le toki pona on garde le sens positif ou en devenir. On a gardé grand (sulli) pour supprimer lili (petit, en attente d'être grand pour un enfant).
Il y a des fois besoin d'insister sur les choses à ne pas faire, même si c'est nul pour faire de la communication non violente (renforcer les bons comportements et ignorer les comportements inadéquats). Mais dans certains, comme la mécanique, plutôt que de lister tout ce qu'il faut faire, il vaut mieux dire la seule chose à ne pas faire (ne pas mettre de lookeed rouge dans des freins à liquide vert !).
On peut utiliser des mots inversés (ala) dans la phrase inversée (double négation), d'où l'utilisation d'un autre terme "la ala" placé en début de phrase.
On dit la phrase N + V + COD, puis le mot "la" qui précise le contexte en qualitatif, puis le contexte :
mi pali mute la mi wile lape. = Quand je travaille beaucoup je veux dormir.
Il est possible de préciser le genre avec les adjectifs meli (« féminin ») ou mije (« masculin »).
mama - parent (père ou mère)
mama meli - mère
mama mije - père
jan lili mije - fils
jan utala meli - guerrière
La phrase commence par un des mots indiquant qu'il faut répondre à la phrase qui suit.
ke : question à répondre par oui si la phrase derrière est juste (pona), non si elle est fausse ("ala pona" ou "ala").
exemple : ke suno li suli ? = le soleil brille-t-il ?
seme => mot à mettre là où on attend une réponse, ou derrière le mot dont on attends un qualificatif.
exemple :
ke seme li utala e sina? = qu'est-ce qui t'a blessé ?
ke jan seme li utala e sina? = qui t'a blessé ?
ke sina li lukin e seme? = que regardes-tu ?
ke sina li pali e ni tan seme? - Pourquoi fais-tu cela ?
ke ona li lon seme? - Où est-il ?
Souvent l'indication de réponse puis le mot à chercher suffit en elle-même :
ke tenpo ? Quelle heure est-il ?
Si on a un doute sur l’usage de seme, il suffit de formuler la phrase en remplaçant seme par ni (ce/cela) comme si on connaissait la réponse. seme s’emploie exactement de la même façon que ni.
Il n'y a pas de s'il te plait ou de merci (à part pona), ni d'ordre. On formule une demande (ce qui est différent d'une question qui attends une réponse, ici on attends une action). On met "o" en début de phrase, pas de sujet donc pas de li devant le groupe verbal.
o weka e len sina = enlève tes vêtements.
C'est pour marquer l'exclamation, la surprise. Juste "a!" placé à la fin de la phrase.
jelo - jaune
kule - couleur, colorer, dessiner ou peindre en couleur
laso - bleu
loje - rouge
pimeja - noir, sombre
sitelen - image, dessiner, écrire
walo - blanc, éclaircir
L’ensemble du vocabulaire exprimant la couleur est indiqué dans la liste ci-dessus. Pour exprimer des couleurs qui ne figurent pas dans cette liste, on combine les couleurs :
len laso - vêtement bleu
len laso jelo - vêtement bleu-jaune = vêtement vert
laso loje - violet
loje jelo - orange
loje walo - rose
walo pimeja - gris
Remarques : On peut toujours préciser plus (laso jelo walo = « vert pâle ») mais en général on évite de rentrer trop dans le détail. On prends l'ordre croissant de fréquences/énergie (du noir/rouge vers le blanc/bleu) pour les couleurs, mais il n'y a pas vraiment de contraintes : loje laso = laso loje = « violet ».
Pour dire qu’une partie du vêtement est jaune et l’autre est bleue, on évite de dire len laso jelo qui veut dire « vêtement vert ». On emploie donc en (et) :
len pi laso en jelo - une robe bleue et jaune
Sans pi, la tournure est incorrecte :
len laso en jelo li lili. - la robe bleu et la couleur jaune sont petites.
On aurait pu garder le c ou le q, on a pris le k, visuellement plus différent. Par exemple, poqaqopa, on ne voit pas tout de suite les p et les q. pokakopa se lit plus vite. Même si le k pour un francophone semble au début "moins beau".
le w et j, les diphtongues, seules consonnes bizarres, sont conservées car on ne peut pas les remplacer par i ou j. Si on admettait la règle i devant voyelle est court (comme dans le prénom "Ian"), on ne pourrait plus former les sons comme dans Odiwan (odian = "odianne", et odijan = "odi-hyanne"). odiuan ou odiwan, odiian ou odijan, il est moins beau de ne pas mettre les w ou j, et le cerveau n'a pas à lire la lettre derrière pour savoir comment la prononcer, long ou court, il sait que ça sera toujours de la même manière.
L'avantage de ce langage est de ne pas utiliser les terminaisons avec des voyelles de l'espéranto, qui obligent les mots racines à se terminer sur des consonnes. Ni non plus d'utiliser des phonèmes compliqué pour les langues asiatiques, ou très proche (un seul cheveux sur la langue et on ne comprends plus rien, alors qu'avec le toki pona on continue à comprendre).
Beaucoup plus simple et efficace que le kotava, qui par exemple complexifie au niveau de l'accent tonique qui n'apparait qu'à l'oral. Avec le toki pona, tout ce qui est à l'écrit se retrouve à l'oral et inversement.
Le Ta Ti, une tentative d'amélioration du toki pona en le réduisant à 98 mots de 1 syllabe !
à suivre...