Première version: 2008-04-26
Dernière version: 2008-04-26
Aller, je vous dévoile toute l'histoire :
Le zèbre c'est une vieille simca 1100 break bricolée par un hurluberlu
génial, avec laquelle il va traverser le désert du Sahara.
Voili voilou...
Comment résumer le livre à cette simple phrase? C'est à la fois une
autobiographie sur les difficultés rencontrées par les hommes de sciences à
s'intégrer dans la société bien pensante qui en sait plus que tout le monde,
la solitude de quelqu'un qui ne s'ennuie pas tout seul, le ricanement des
imbéciles devant des inventions géniales mais trop récentes ou étonnantes
pour avoir été élevées au grade de "normal", la découverte du monde à
l'entrée de l'âge adulte, la description d'une époque en train de vivre la
révolution informatique et électronique, le choc de 2 mondes - riches et
pauvres - séparés par une bande de mer. C'est aussi la débrouillardise et
l'accomplissement d'un rêve, coûte que coûte.
C'est aussi une formidable leçon de bonheur, à savourer à chaque instant. Ce
livre donne une patate d'enfer, et l'envie de quitter sa routine quotidienne
pour partir loin à l'aventure!
Bref, un livre à lire même si on n'y connais rien en voiture, là n'est pas
le but!
Le livre fleure bon le début des années 80, ça m'a rappelé l'idée que l'on
se faisait d'une voiture futuriste à l'époque, idée que l'on retrouve dans
le feuilleton K2000 (la voiture qui fume pas, boit pas, mais qui cause) de 1986, et qui ressemble à un robot avec plein d'électronique
partout. Sauf que là, il l'a vraiment concrétisé, et en 81!
L'auteur raconte d'abord sa vie : C'est d'abord une mère seule qui ne peut
surveiller tout le temps son petit garçon, à qui elle laisse le grenier en
libre service. C'est ensuite un petit garçon curieux, imaginatif,
débrouillard et sans à priori qui va expérimenter un peu tout et n'importe quoi,
du moment qu'il y a des électrons qui se baladent dans ses expériences!
A ce jeu là, il devient très vite balaise en électronique, à 12 ans il
bricolait un générateur de rayons X...
Il récupère tout ce que les autres jettent, il répare puis améliore...
Évidemment, un tel génie est tout de suite repéré par l'éducation
nationale... sous l'étiquette de mauvais élève. Après avoir redoublé, on
l'oriente de force dans une classe voie de garage dite pudiquement 6éme de
transition, spécialité bâtiments (à l'époque on manque de plâtriers). Le
gars finira malgré tout ça ingénieur électronique... Il passera dans les bureaux
d'étude de l'armée pour le guidage balistique des missiles puis dans les
calculateurs d'injections automobiles. Belle revanche pour le soit disant
cancre...
Mais avant tout ça il faut qu'il réalise son rêve d'aller dans le
désert.
Nous sommes en 1980, il acquiert alors une "antique" simca 1100 break (ce
modèle n'est pourtant sorti que 12 ans avant...), car c'est une des voitures
les moins chères de l'époque en occasion (on a une bonne simca 1100 pour le
pris d'une 4L rouillée jusqu'au volant...). Le garagiste qui lui vends lui
confirmes le bon état de celle ci, pour preuve, les balais d'essuie glace sont
neufs!
La simca 1100 est le début de ses ennuis, les dames de la bonne société
n'ont jamais aimé cette voiture, mais encore moins quand elle est peinte en
blanc rayé de noir, comme un zèbre. C'était pourtant pour attirer
l'attention dans le désert en cas de problème. Pour l'attention l'effet est
réussi!
Il faut dire qu'il a enlevé la calandre rieuse de la simca, et peint (sic!) le
radiateur couleur zèbre! Bonjour les échanges thermiques avec les ailettes du
radiateur! Il faut dire qu'il a fait plusieurs erreurs concernant une
optimisation parfaite de ses inventions, comme le poids excessif, mais au
final tout a marché parfaitement!
Le pare buffle énorme dessiné comme Darth Vader de Star Wars n'est pas
étranger aussi au look spécial, qui lui vaudra tout le temps des réactions
allergiques et terrifiées d'un certain type de personnes!
Le succès de son voyage tiendra essentiellement à la préparation parfaite de
la voiture. Il s'entraine pendant de longs mois à démonter et remonter
toutes les pièces de la voiture comme l'embrayage, le soir, dans le froid sous
la pluie et le vent, afin de maitriser parfaitement sur le terrain ce genre de
pannes qui n'ont pas la même gravité sur le bord d'un trottoir Orléanais
qu'au milieu du plus grand désert de la planète... Il sait que si le moteur s'arrête sa vie s'arrête avec lui.
Le seul inconvénient de la simca, c'est que même si c'est une bonne
baroudeuse sur tous les chemins, un peu de glaise mouillée et elle ne veut
plus repartir. Le premier bricolage de Chris sera d'installer un blocage
électromagnétique de différentiel, transformant ainsi sa 2 roues motrices en
engin surclassant les 4x4 de l'époque. Et qui lui permettra de sortir des
sentiers battus.
Avec l'adjonction des 4 roues de secours jumelées aux 4 roues de la voiture,
il peut passer dans les pires conditions de sable mouvant, doublant la surface
des pneus au sol. Et il faut bien ça quand on voit tout le poids en plus que
supportait la 1100!
Pour plus de grip, la dimension des roues passe à 14 pouces au lieu de 13, la
garde au sol est augmentée en retendant les barres de torsion, la
crémaillère est renforcée, et l'alternateur est remplacé par un plus puissant, qui doit générer
beaucoup d'électricité. Plusieurs batteries additionnelles prennent la place des sièges arrière pour la
partie électronique. Des radiateurs d'eau sont rajoutés pour assurer le
meilleur refroidissement possible.
Des vérins électriques de désensablage aux 4 coins (des crics avec des
moto-réducteurs électriques...), et la voiture se sort toute seule des
tempêtes de sable où le niveau du sable monte d'un mètre tous les 1/4
d'heure... pour une tempête qui peut durer une semaine! L'une des raisons qui
font que les gens disparaissent dans le désert sans laisser de traces.
Le meilleur de ses "bricolages" est le calculateur centralisé genre K2000,
sorte de micro ordinateur embarqué et qui pilote tous les capteurs et
actionneurs de la voiture. Sorte de GPS avant l'heure (vu que le GPS n'existait
pas encore!), il mémorisait les déplacements de la voiture au centimètre
près, et était ainsi capable de se retrouver sur une carte du moment qu'il
connaissait le point de départ.
Il avait essayé de faire breveter son système l'année d'avant, mais avec
moins de 20 ans et des composants japonais que les gars des brevets ne
connaissaient pas, il s'est fait gentiment jeter dehors. Comme pour l'école,
il n'est pas bon d'avoir raison trop tôt ou d'être meilleur que ses
maitres!
Comme le micro ordinateur n'existait pas, il utilise 40 microcontrôleurs, avec
un clavier récupéré sur un minitel, et un écran miniature à cristaux
liquides, le must de l'époque pour un bricoleur désargenté.
Pour mesurer la vitesse du vent, un anémomètre fabriqué ... avec des petites
cuillères.
Une autre difficulté était d'intégrer cette électronique dans une voiture,
siège de parasites, de vibrations, etc. Certes, l'ordinateur de bord existait
depuis 1978 dans la simca horizon, une simca 1100 relookée, et depuis
l'apparition de l'autoradio les voitures sont déparasitées, mais il restait 2
- 3 filtres à développer. Sans compter le fonctionnement de l'électronique
dans l'endroit le plus chaud de la planète, nécessitant un refroidissement
top niveau.
Autre équipement bien sympa, la très haute tension générée par la
voiture, qui émet alors des éclairs dans tous les sens, étourdissant tout ce
qui ne se trouve pas à l'intérieur, protégé par l'effet cage de faraday et
d'iso potentiel. Il se sortira ainsi d'une attaque en règle d'un groupe de 6
attaquants au Maroc.
Ou encore les "radars" qui pouvaient détecter le moindre bruissement de pattes
sur le sable venant du plus petit insecte, et de donner à l'écran la position
de l'intrus.
Ou encore la possibilité d'afficher sur l'écran le paysage environnant alors
qu'on n'y voit pas plus loin que l'épaisseur du pare-brise...
Comme je l'ai déjà déjà dit, la voiture plombait énormément. Combien? Il
n'en parles pas, mais on peut estimer à 60 kg de batteries supplémentaires,
30 kgs les 4 vérins de désensablage, le système de réfrigération à 30
kgs, les 100 l d'eau et 100 l d'essence (10 jerricanes, mais 10 ou 20l?) dans
les 180 kgs, la deuxième boite de vitesse 50 kgs, ce qui nous amène à un
sur-poids de 400 kgs, plus les 55 kgs du monsieur, plus les lourdes grilles
protégeant toutes les vitres, les nombreux mètres de plaques de
désensablage, l'arceau de sécurité énorme qui faisait terrasse sur le toit
de la voiture, les tôles du compartiment doublée pour améliorer le
refroidissement, le lourd pare-buffle et les doublage de toutes les tôles, les
4 roues de secours, les caisses à outils, la nourriture, les chaines et
cordes, extincteurs, cardans, la grosse barre à mine de 1m50, même si il
faut enlever le siège arrière qui a été retiré, on dépasse largement les
500 kg de charge utile inscrites sur la carte grise. Peut-être 700 kg de
surcharge? On est loin ici du " Léger tu passes, lourds tu casses " cher aux
raids deuchistes.
Et pourtant, il était conscient des efforts importants subis par la voiture.
Passer le moins possible en force, faire des petites pièces fusibles qui
pètent à la place des grosses, et prennent moins de poids comme pièces de
rechange (comme les biellettes de direction limées).
Dans des vents de 300km/h, sa lourde voiture était quand même secouée comme
un fétu de paille!
Sinon, on peut aussi remarquer le fait qu'il ait fait une confiance totale au
moteur. Certes, ce dernier à la réputation d'être increvable et d'être
performant, mais la moindre panne et tout son système s'écroulait : plus
d'électricité pour l'ordinateur, même le treuil de désembourbage était
relié aux roues avant donc au moteur.
Apparemment, il n'y a pas touché, et il a fonctionné correctement, bien que
la fumée bleue au rétrogradage lors de l'achat indiquait que ce moteur avait
pas mal de bornes dans la gueule, et une segmentation à refaire.
Le voyage en lui même :
C'est tout d'abord le Maroc, où le plus dangereux est l'homme, tant dans sa
violence physique d'agression que dans ses entourloupes diverses. La
découverte de la pauvreté dès lors qu'on s'éloigne des cars des voyages
organisés, la stupidité des touristes occidentaux qui se croient tout permis,
le chaleureux accueil de la population.
Le désert ensuite, avec pour seul mot d'ordre de ne pas prendre de
pistes...
La légende d'une cité fabuleuse remplie d'or et de pierres précieuses,
enterrée sous les sable du désert, et qui réapparait de temps à autre pour
quelques instants dans l'oeil du cyclone d'une tempête de sable. Des
techniciens de la Nasa et leurs camions bardés d'électronique et d'antenne
satellites, et qui sondent le désert à la recherche de cette cité.
Une vallée creusée par une boule géante et où vivent des milliers de
serpents qui attaquent tout ce qui bouge, et tuent devant lui plusieurs gros
dromadaires. La voiture sera attaquée de toute part par ces reptiles dont le
poison terrasse un homme en quelques minutes. La Simca ensablée jusqu'au
châssis dans du sable fin comme du talc, dans une chaleur de 45°C, au milieu
de ces tueurs surexcités, il devra pourtant s'en sortir!
Le désert du TannezRouft, pratiquement inviolé et où ont disparus tant de
caravane. Il trouvera l'explication aux 2 phénomènes les plus étranges,
cette trouvaille ayant failli lui être fatale! En effet, les boussoles se décalent subrepticement dans cette zone riche en fer, jusqu'à faire tourner en rond celui qui se fie trop au magnétisme déboussolé de cette région, et un vent mystérieux soufflant à 200 km/h mais juste sur quelques centimètres du sol, décapant les jantes et les pneus, arrachant jusqu'aux chairs la peau des pattes des chameaux.
Des rencontres insolites de personnes survivant dans le désert dans un
dénuement total, juste en ayant creusé un grand trou pour aller chercher l'eau et piéger les bêtes qui tombent dedans.
Une tempête de sable. Grâce à son calculateur, il pourra recréer sur
l'écran les dunes qu'il ne voit pas (l'ordinateur analyse les déplacements de la voiture et anticipe la dune qu'elle monte ou descend en fonction de son inclinaison) et sortir de ce mauvais pas.
L'enlisement de la simca, qui aurait pu être recouverte par plusieurs mètres
de sable sans le programme de désensablement automatique (chaque vérin électrique s'actionne séquentiellement, permettant de sortir une des 4 roues du sable, et cela pendant toute la nuit que dure la tempête).
Une cuvette où la température monte à 70°C à l'ombre, et où le moteur
s'arrête, victime du vapor lock. Comment il survit grâce à un système de
clim rudimentaire mais qui lui permis de tenir jusqu'au soir! (système d'évaporation de l'eau).
Tout au long de son récit, on ressent tout ce que le "vrai" désert a
d'extrême, et la fragilité de la vie humaine, où le moindre insecte, le
moindre grain de sable peut vous tuer. Cette peur reste là, omniprésente tout
le long du livre.
Le livre en lui-même est absolument passionnant, on a du mal à le lâcher
pour aller dormir! Il n'en reste certains points que j'aurais aimé
développer, même si ces points n'intéressent que moi :
Quel modèle de simca avait-il? de quelle année? Le 1200 cm3 de la simca 1100
spécial? parce qu'à de nombreux moments, j'ai eu l'impression que mon petit
1100 cm3 de 60 ch n'aurait pas pu faire l'affaire...
Comment a-t-il fait pour loger un blocage de différentiel dans la boite de
vitesse? Je comprends pas comment on peut foutre une tige mobile de blocage sur
un satellite dont l'axe de rotation est lui même en mouvement dans le boitier
de différentiel? Une sorte d'électro-aimant soudé dans le boitier, avec deux
bague d'alimentation électrique sur le boitier?
En général, il faut bloquer un des 4 éléments du système avec le boitier
de différentiel, on bloque plutôt via une fourchette de commande la couronne
avec l'arbre de transmission via un synchro, ce qui a pour effet de bloquer le
planétaire donc le système de différentiel.
Et pleins d'autres questions qui me sont venues à la lecture du livre, mais
tellement nombreuses que je ne peux me les rappeler toutes!
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Bref, si vous cherchez à vous procurer le livre, voilà le lien :
http://perso.magic.fr/unzebreausahara/livre.htm
à suivre...